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Quoi de neuf ? La sagesse monastique

Quoi de neuf ? La sagesse monastique
Quoi de neuf ? La sagesse monastique

Quoi de neuf ? la sagesse monastique…

Ora et labora, prier et travailler c’est ainsi que l’on résume la vie monastique. C’est sans doute juste, mais un peu court. Si l’on se pose la question du quotidien du moine, on a des reportages tel le magnifique film « le grand silence » de 2007 au sein des chartreuses, ni musique ni commentaire, juste la vie des moines qui défile et tente de nous décrire leur vie.
Dom Jean-Pierre Longeat s’y risque après 23 années passées à la tête de l’abbaye bénédictine Saint-martin de Ligugé, il assure depuis 2013 la présidence l’Alliance intermonastère chargée d’encourager la solidarité entres les monastères partout dans le monde, il décrit dans un bref opuscule de 216 pages paru en poche, la vie d’un moine suivant son rythme alternant, prières et travail dans un « 24 heures de la vie d’un moine ».

 

« Quand Dieu règle tes problèmes, tu as alors foi dans ses capacités et ses pouvoirs ;
Quand Dieu ne règle pas tes problèmes,
c’est qu’Il a foi
dans tes capacités et ton pouvoir de les régler.»

 

Les textes du moine sont ainsi distribués ou répartis qu’il récite le psautier entier chaque semaine. « je chanterai en présence des anges ».

Certes on y (re)découvre les prières et leur sens : tierce, sexte, none, l’eucharistie, vêpres et complies, le travail manuel accompli (« ils seront vraiment moines lorsqu’ils vivront du travail de leurs mains à l’exemple de nos pères et des apôtres » règle de saint Benoît) et sa diversité presque illimitée selon les lieux (alimentaires, non alimentaires, artistiques ou non, avec un respect pour les outils de production à traiter comme les vases sacrés de l’autel (RB 31,10). Les rôles de chacun sont définis clairement  par Saint Benoît. Ce géant, Benoit de Nursie, a écrit un texte vieux de quinze siècles dont on n’a pas encore découvert toute la richesse et les pépites. Pourtant il est né quelques années après la chute de l’empire romain en 476 a déserté Rom été ses écoles de rhétorique pour s’établir dans la solitude d’une grotte à Sublaco en contreforts des Apenins, nous signale Sébastien Lepaque, qui qualifie la règle de Saint Benôit d’une « règle pour bien vivre ». Les tâches divisées selon saint Benoît  sont ainsi confiées à la direction de l’abbé, prieur, porterie, cellérier (intendant) … mais principalement comment le moine discipline l’heure du découragement (démon de midi et le démon de l’acédie), ses passions, la nourriture, ses colères, sa juste ou sa mauvaise tristesse, le respect de la discipline « son oui » quotidien, car l’aventure ne se termine pas au prononcé des vœux, elle ne fait que commencer.

« Celui qui a un véritable amour pour  son prochain a banni la colère de son âme »
Et jeté les justifications de sainte colère ! Jean Climaque in l’échelle sainte.

Parlons aussi de cette nourriture toujours prise avec parcimonie, le nombre de repas  est passé à 3 alors que ce n’était pas la règle, et qu’il était recommandé de sortir de table avec encore un peu de faim selon les pères du Désert.
Dans l’Antiquité on croyait que la viande avait une telle force énergétique telle qu’elle  ne permettait pas de bien lutter efficacement contre les passions. On lui a toujours préféré les régimes végétariens ou la volaille, deux pattes donnant sans doute moins de force que les 4 pattes. Elle était admise dans l’assiette en dehors des jours de jeûne.

Si la bière remonte loin dans l’habitude des moines, souvenons-nous des bières récupérées par les publicités,  le vin réservé au sacrifice eucharistique était assez mal vu : « le vin fait apostasier même les sages » dit la règle de Saint Benoît.(RB 40,7). Le tout dans la plus grande sobriété, le moine ne devant pas manger à l’extérieur du couvent. Il partage les biens reçus avec ses frères en communauté sans tomber dans les travers du goût excessif pour la nourriture.

En effet, le repas (l’agape) est vu comme le prolongement de l’eucharistie, héritière du repas fraternel qui suivait l’eucharistie au temps des apôtres, les frères s’y servent  mutuellement, la règle prévoit un lavement mutuel des pieds au moment où ils terminent leur travail hebdomadaire.
Le repas se fait en commun, avec des places fluctuantes et non par affinité, en silence, avec la lecture monocorde de l’évangile, d’une vie de saint ou d’un ouvrage spirituel choisi par l’abbé.

 

 ils seront vraiment moines lorsqu’ils vivront du travail de leurs mains à l’exemple de nos pères et des apôtres  Règle de S.Benoît

Le psautier prié intégralement en une semaine

Allégresse pour qui s’abrite en toi,
joie éternelle !
Tu les protèges, pour toi ils exultent,
ceux qui aiment ton nom »

Psaume 5


Le Seigneur ouvre les yeux des aveugles,
Le Seigneur redresse les accablés,
le Seigneur aime les justes
le Seigneur protège l’étranger.
Il soutient la veuve et l’orphelin
il égare les pas des méchants, d’âge en âge, le Seigneur régnera…

Dans les règles les plus délicates sans doute à l’ère de la contestation de toute forme d’autorité est la règle de l’obéissance. Dire « oui » au père abbé équivaut à dire Oui à Dieu semble être l’explication spirituelle à admettre par le moine. « le labeur de l’obéissance te ramène à celui dont t’avait éloigné la lâcheté de la désobéissance » rb prologue. Dès son prologue la règle de saint benoît va évoquer cette priorité qui calme l’âme et rend la vie plus aisée offrant L’humilité du cœur. L’écoute (ob-scultare, ob-audire) une écoute attentive, celui qui n’écoute pas n’est pas en mesure de lui obéir.
Incline l’oreille de ton cœur,
Accueille de bon gré (excipe)
Accomplis efficacement selon les étapes pour obéir sans les enjoindre à des choses impossibles (chapitre 68) ou au-dessus de leurs forces, il faut ainsi beaucoup de clairvoyance à l’abbé pour diriger ses frères.
La collection Bouquins édite un fabuleux « Les Bénédictins » sous la direction de Daniel -Odon Hurel, de 1344 pages découpant les 73 chapitres de la règle de saint Benoit pour en montrer toute la richesse et l’actualité. Elle est souvent qualifiée « d’ascenseur pour le ciel » qui complétera l’entrée en matière proposé par son confrère en religion.

Loin donc d’être journalistique ou illustratif, Dom Jean-Pierre Longeat en profite pour nous initier et tenter de devenir pour quelques pages un directeur spirituel qui nous accueillerait à la porterie de son monastère et nous ferait goûter les mets parfois âcres parfois doux de la vie qu’il partage avec des milliers d’hommes et de femmes qui en commun tentent d’approcher l’infiniment Autre comme il aime à le décrire. C’est donc une erreur de vouloir comme le fait une école actuelle du management la transposer à l’entreprise, car elle est une leçon d’apprentissage du divin, on ne doit pas lui ôter sa dimension verticale et ne  lui laisser qu’une dimension horizontale qui n’aurait pas de sens, car elle n’aurait pas d’objectif et surtout pas celui de mettre le dieu argent (ou profit) ou lors de ce séminaire pour les élus locaux à l’approche des élections municipales, l’homme,  à la place du Tout Autre qu’est Dieu.
En tous les cas on ne peut pas la comprendre, si l’on ne « comprend pas l’homme biblique » conclut Dom Nault. Avec sa dignité et  comme clé de voûte, explique-t-il,  « le Seigneur»
La recette n’existe pas, mais l’objectif est de « vivre constamment avec Dieu, de l’avoir constamment présent à votre cœur, quand vous parlez, lisez, veillez (travaillez), ou réfléchissez à quelque chose ».  Higoumène Chariton de Valamo, l’art de la prière.
Que chaque chose se fasse pour la gloire  de Dieu, amoureux de Dieu, plutôt qu’obsédé de Dieu.
(Sagesses, Points, 7,50, éditions du Seuil, 2008, 2011)

On ne peut pas  comprendre la règle de Saint Benoît , si l’on ne « comprend pas l’homme biblique, Avec sa dignité et  comme clé de voûte « le Seigneur»
Dom Nault.
Père Abbé de Saint-Wandrille

 

 

 

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