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Traditions de la semaine Sainte


Processions de Rameaux : La fête des rameaux serait très récente, Statue du Christ Ressucité, Monastère de Schwarzach (Bade-Wurtenberg)

(photo : préparation des rameaux le samedi précédant lesrameaux, les enfants de la première communion préparent les rameaux avec des adultes on y accroche fleurs en papier crépon et des rubans multicolores)IMG_1568-copie-1.JPG



IMG_1570.JPG
à en croire, Van Gennep, l’église ne l’aurait institué qu’au milieu du V ème siècle. Elle l’ignorait au commencement du IVème siècle. 1 Ce ne serait qu’au cours du VIII ème siècle que la tradition de se tenir une palme à la main, le dimanche des Rameaux,  s’implanta partout en Europe. 2

Il était de coutume en Alsace, il l’est toujours dans le Tyrol et le Sud-Tyrol, de porter dans la procession des rameaux des arbres non seulement chargés de rubans, comme cela se fait encore ici et là en Alsace, mais aussi de bretzels, -comme ici à Traur près d’Innsbruck,  de pommes, de rubans multicolores, d’un Christ monté sur un âne, le tout porté au moyen d’un manche.

TRADITIONS DU TYROL ET DE L’ALSACE LIEES ...
On le voit dans les traditions de Noël, de Pâques, les similitudes sont fortes, saviez vous que l’Alsace et le Tyrol ont été liés sous les Habsbourg. Notamment sous la même régence d’Innsbrück. D’ailleurs un certain nombre de Tyroliens sont venus repeupler l’Alsace après la guerre de Trente ans.

DE DRÔLES DE NOM POUR CETTE FÊTE

Capitolavium   est le nom primitif de ce dimanche, par ce qu’on lavait la tête des fidèles. Dimanche des Paumes (dans le pays Messin), Pampies dans le Saulnois et le Pays vosgien. Ces noms s’appliquent souvent au nom des branches que l’on utilisait pour la procession.

PALMES A BRETZEL
C’est une tradition encore répandue dans les villages des environs de Mulhouse, du Sungau, Masevaux, vallée de Thann,3  pour le jour des Rameaux, l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem, quelques jours avant sa crucifixion.
Dans la vallée de Thann, jusque dans les années 60-70 on trouvait trois modèles de palmes, éloignées dans la forme de celles utilisées dans la Tyrol, mais dont le contenu (les objets accrochés, rubans, bretzel, fleurs) est identique.


A la fin de la marche, les servants de messe tirent une statue du Christ (grandeur nature) monté sur un âne posé sur des roulettes.
Les processions évoquant un Christ monté sur un âne vivant sont attestées dans les rhénans dès le Xème siècle, le remplacement progressif par une statue du Christ sur un âne, posé sur des roulettes, est plus récent (vers le 14è siècle). Les musées alsaciens possèdent de rares exemplaires de ces Christ sur leur monture. Très rares sont celles du XVI è siècle4  car avec la Réforme nombre de ces œuvres furent détruites en Alsace et en Allemagne. La critique fut sévère, l’écrivain Johann Georg Jacobi en fit la description. On en retrouva jusqu’à la Révolution puis détruits peu d’exemplaires subsistent.  Quelques villes alsaciennes conservent encore ses statues et plus rares sont celles qui les utilisent pour des processions. Tel ce village tyrolien photo, ou ce village alsacien blotti dans le vignoble qui perpétuait la tradition.
En Allemagne, dans  la ville de KöBlarn, Bistum Regensburg, la tradition est attestée sans interruption depuis 14815   Plusieurs musées permettent de voir ces statues de Christ sur âne : Ulm, Bâle et Cologne. (p. 318). Certains de ces ânes avaient un ventre creux muni d’une trappe qui permettait d’en faire sortir des friandises pour les enfants.

L’âne est important dans la vie de la Sainte Famille, voir notre numéro de noël sur le noël des animaux.6
Un lancer de rameaux ?
Les rameaux ont les tient à la main pour la bénédiction et pour se souvenir du peuple de Jérusalem qui a bénit le Seigneur et l’a laissé être crucifié quelques jours plus tard. Saviez vous qu’au XVIème siècle, le curé de Saverne l’écrit, on pratiquait le “Palmenschiesst” soit des branchettes que l’on lançait vers la croix.

Geiler de Kayserberg virulent à l’égard de toutes les superstitions, Saint Nicolas, enfant Jésus, etc... n’y trouve rien à redire et il recommande même la conservation de ces rameaux bénits en vue de chasser les mauvais esprits et leur accorde la vertu d’éloigner les orages. On voit mieux pourquoi une telle tradition s’est conservée solidement dans notre région. 7

Que fait-on des restes de Rameaux ?
Tout ce qui est béni ne peut finir dans les ordures, on le détruit par le feu. C’est ainsi que les Cendres du mercredi des Cendres de l’année suivantes sont constituées par les restes des rameaux de la fin du carême précédent. Le nom date du  6 ème siècle. 

Jeudi Saint : quand la tristesse devient verte...
Gründonnerstag :  il a été ainsi nommé car ce jour on mange de la verdure. La maîtresse de maison se fait fort dans un plat de n”y ajouter que des ingrédients verts. On a ainsi des lieux où l’on présente des Soupes aux 7 plantes (poireau) ou des dents de loup (persil, salade,épinards,poireau,....) ou 9 légumes verts, en Souabe on sert des ravioles (Maultaschen) remplis de verdure, ailleurs ce sont des Beignets d’épinards, soupes de légumes verts, ou gâteaux de plantes. En fait le mot est une déformation de l’allemand qui dit “Greinendonnerstag” qui signifie “pleurer”et être “triste” comme le Christ au jardin des oliviers où il ressentit douleurs et angoisses.

Lors de l'office, je me souviens m'être servi en tant que servant de messe d'un Klepri, on dirait une crécelle, un petit marteau qui vient heurter une planche en bois. Il ne servait à Eichhoffen que pour cet office du jeudi saint au moment de la consécration et de l'élévation.
Mais d'autres ouvrages alsaciens nous signalent en avoir usité pour faire l'annonce des offices dans les rues de la paroisse.




par un mouvement de va-et-vient le "klepri" (ce qui décrit bien son bruit) le marteau frappe la planche des deux côtés au moment de la consécration eucharistique du jeudi saint. (collection personnelle, photo lanterne)








IMG_1373.JPG Représentation moderne de la crucifixion de Jésus,
Monastère de Schwarzach, Bade-Wuretenberg.

Pas de voyage

Jamais un Alsacien n’aurait entrepris un voyage, même une promenade un vendredi saint,
ainsi Elisa Rossignol raconte dans son livre de souvenirs d’enfance “pour rien au monde, (ma mère) n’eût effectué le plus petit voyage, la moindre promenade ce jour-là.” Cela aurait été un chemin de croix.
“Une petite coïncidence ou une secrète prérogative a voulu qu’elle fasse le grand voyage un vendredi saint.”.  8

Habillé de neuf pour pâques.
Non pour se faire voir, mais pour honorer le Ciel et la résurrection du Christ, les femmes se revêtaient d’une nouvelle robe, généralement faite par leurs propres soins  pour honorer la  cérémonie. 

L’offrande d’oeufs est fort ancienne elle date des Chinois ou des romains. A l’occasion de la fête de Cérès, déesse de l’agriculture, qui le 19 avril recevait une offrande d’oeufs et de pain pour gagner ses faveurs.

Les bénédictions d’oeufs par l’église datent du XII ème siècle, même le roi de France en distribuait.


Dessinez-vous des oeufs ? 
79 % des Allemands décorent la maison pour Pâques, et  65 % dessinent des oeufs, 55 % les cachent à cette occasion, 42 % participent aux offices de pâques, 19 % cuisent un agneau pascal (voir plus loin). Et vous ? 9 
Pour vous pâques,
c’est juste un long week-end ?


Le plus gros œuf pondu pendant la Semaine Sainte était offert au roi au XVIII è siècle10 .

Très mobile, Pâques (du 22 mars au 25 avril).
La fête de Pâques mobile a été fixée par le Concile de Nicée, en 325, définitivement au premier dimanche qui suit la première lune après l’équinoxe de printemps. L’année solaire comportant douze mois ne concorde pas avec l’année lunaire qui en comporte treize, ainsi la première lune peut-elle tomber à des dates variables. La règle veut que Pâques tombe un dimanche donc la fête pascale est très mobile dans le calendrier.
Un temps on a songé à figer la date de Pâques au 8 avril, mais ce ne serait pas toujours un dimanche. Le pape a aussi pris des contacts avec les orthodoxes afin de trouver un terrain d’entente pour fixer une date commune aux deux calendriers.
En vain jusqu’à ce jour.

Agneau vivant
On sait que le sacrifice du bouc-émissaire est resté dans la tradition à la  suite  du bouc offert, après qu’Abraham ait posé  son propre fils sur le bûcher  pour l’offrir à Dieu. Agneau est un symbole de l’Ancien testament offert pour la Pâques juive, rôti et non  bouilli, mangé en une seule fois, les restes étant brûlés... Il reste quelque chose de ce sacrifice juif, dans le village de Matrei, dans l’Ost Tyrol où un agneau vivant assiste à la Messe, avec de beaux rubans , de branches de romarin, fleurs, et une couronne de fleur sur la tête, signe vivant de l’offrande, le deuxième vendredi après Pâques. Des mois plus tôt il est acheté et mis dans une étable à part où il sera bien nourri. Quelques jours avant la procession, il sera lavé, sa laine n’a pas le droit d’être tondue, coiffée et brossée.
Après l’office il est vendu au profit d’une organisation caritative.
Jadis nous disent les livres, sa chair était véritablement distribuée aux pauvres.11

Les “jeux” de la passion ?
Voir notre article sur le sujet sur ce blog.








Hamele- Hämele - Làmele : biscuit de pâques

IMG_1353.JPGAgneau (agnus dei, lepus paschalis, agneau pascal et agneau de sacrifice) en biscuit, symbole du Christ dans l’Apocalypse,  cuit dans un moule traditionnel en terre cuite, une fois cuit il est saupoudré de sucre glace et décoré d’un drapeau aux couleurs blanche et jaune du Vatican. Même si aujourd’hui il en arbore également d’autres.
Se dévore à Pâques au petit déjeûner ou au dessert. 
Le principal composant est l’oeuf, en effet après le jeûne du Carême où l’oeuf était proscrit, les garde-mangers regorgaient de cet aliment c’était un excellent moyen de diminuer les stocks ainsi accumulés.
Cette tradition remonte au moins au XVI ème siècle,   chaque fiancé offrait à sa promise, pour pâques, un agneau. En 1519, l’auteur Thomas Murner souligne qu’on offrait un mouton en biscuit à sa promise.

IMG_1378.JPGPas de cloches :
Même si les chocolatiers sous influence des Français de l’intérieur (!) proposent maintenant aussi une ou deux cloches -pour la forme- le premier apporteur de cadeaux c’est bien le lièvre de pâques. En se fiant, selon certains, à son habitude de veille (il dort les yeux ouverts) ou à la tradition antique de fidèle compagnon de la déesse Ostara, célébrée à ce moment là de l'année. Selon l’ouvrage encyclopédique alsacien d'Herrade  , "Hortus Deliciarum" jadis conservé au Monastère du Mont Ste Odile (XI e siècle) le lapin est symbole du péché de chair. Les "incontinenti" (les incontinents sexuels ceux qui ne peuvent se contenir) ou "insatisfaits". Saint Boniface en 751 décrète l'interdiction de manger du lièvre pour conspuer toutes les valeurs qu'évoquait cet animal. L'interdiction sera renouvelée par le pape Zacharie, mais la coutume n'en a eu cure en Germanie.  Le lapin est aussi un signe solaire, un symbole de la fécondité sur des fresques anciennes dès l'antiquité. Et aujourd'hui dans l'opinion et le langage courant le lapin est symbole de fécondité
On peut rapprocher le lièvre d'autres divinités notamment Ases.
L’association du lièvre qui pond des oeufs et de Pâques est attestée depuis le XVIème siècle. Johann Fischart y fait clairement allusion en 1572 en utilisant haseneier  (c’est-à-dire des oeufs de lièvre !). Au XIX ième une chanson proclame :
“Dies Ei hat gelegt der Has
fer dich, min Schatz, ins grene Gras”.
(Cet oeuf a été pondu pour toi, mon trésor, dans l’herbe verte).
(Pour en savoir plus, lisez l’article dans ce dossier.)





Communion annuelle ?
Faire ses pâques, était jadis, se confesser et communier au moins à Pâques et à Noël. Chez les protestants c’est assister au moins à un office de la Semaine Sainte et de participer à la Sainte Cène.

(veillée pascale, bénédiction du cierge pascal par le Pape)
Samedi Saint
La fin du deuil liturgique.

Tout le deuil liturgique du vendredi saint, la fuite des cloches depuis la mémoire de l’institution de l’Eucharisitie (Jeudi Saint), est achevé dans la nuit de Pâques.
“Voilà la nuit, la sainte nuit qui s’illumine” s’exclame la liturgie. La formule éveille un parrallèle avec la nuit de noël.
Le feu pascal dans la nuit du même nom est le symbole fort de la résurrection. Au travers de ce que l’on nomme la “liturgie de la lumière”.
Avant la naissance du Christ, le Peuple marchait dans  la nuit des ténèbres dans l’attente du Messie, les premiers disciples sont la nuit du doute après la crucifixion de Jésus en qui ils fondaient tout leurs espoirs. Pâques révèle le message de la résurrection, comme Noël annonçait l’Incarnation. Le Christ étant la  lumière du monde,  on bénit le feu nouveau et on en appelle à l’espérance de la fête de l’éternelle lumière. (liturgie).
Ce feu préparé par les servants de messe ou les sacristains, quelquefois les futurs communiants est élaboré, dans certaines paroisses, avec des morceaux de vieilles croix de cimetières, d’anciens rameaux.
Il existe son pendant  (lorsqu’ils ne sont pas confondus) un feu d’enfants de choeurs  selon Michèle Bardout (in la paille et le feu) qui se nommerait “ brûler le juif” ou le symbole de la perte par le feu de l’enfer de ce 12ème apôtre, Judas, qui a trahit le Christ et dont l’évangile précise qu’il aurait mieux vallu pour lui qu’il ne soit  pas né. Le feu crée en Alsace pouvait même, dans sa version non liturgique, être surmonté d’un mannequin de paille, déformation d’une coutume carnavalesque,  dans le Jura alsacien.

La nuit pascale est riche de symbole, outre la bénédiction de l’eau qui peut servir aux nouveaux baptisés de la nuit de Pâques.

Au matin de pâques, le ciel lui-même trésaille de joie, ne raconte-t-on pas aux enfants que l’astre lui-même effectue tois bons joyeux sur l’horizon pour exprimer sa joie au Créateur. On trouverait ici un symbole solaire. Cette explication semble corroborée par les adeptes du culte païen solaire qui en de nombreux endroits s’en vont au matin de pâques admirer le soleil sur la colline.

Pâques : La messe du matin
la réssurection du Christ, s’accompagne du réveil des cloches, en fait de retour de Rome, la surprise du lièvre de pâques, un peu moins magique du fait de la prolifération de cette animal dans les vitrines des confiseurs et chocolatiers tout au long de la période du Carême, et bien évidemment la distribution du lièvre en sucre rouge cuit (traditionnel de l’Alsace et du pays de Bade) et des oeufs décorés qui ne sauraient manquer sur les tables ou dans les moussehiesele (nids en mousse préparés par les enfants dans les jardins afin que le lièvre y ponde ses oeufs décorés, et sujets en chocolat).




Le symbole du poisson : symbole pascal.

il est présent dans les ateliers de céramique de Betschdorf, où l’on fournit des moules à gâteaux vernissés et décorés en forme de poisson. Il est dépassé par celui de l’agneau, on en vend encore pour la seule décoration des cuisines mais il sert moins en pâtisserie. 
Le premier symbole du Christ est le poisson, bien avant celui de la Croix, car le Christ a multiplié les poissons dans le lac pour ses disciples, le pain et le poisson pour la multitude des fidèles qui l’avait suivie, après sa résurrection avec les disciples... Le poisson n’est donc pas un aliment anodin dans la symbolique. Mais plus encore il est le symbole du mot Christus.




1. Van Gennep, le folklore français, collection bouquins, page 973.
2.   certains ont fait le rapprochement avec un culte oriental Bérenger-Féraud, qui y voit un vestige du culte sabéiste et du paganisme.
3.   Michèle Bardout p 66
4.   la paille et le feu, traditions vivantes d’Alsace, par Michèle Bardout, espace des homme, Berger-Levrault p 70
5. Manfred Becker-Huberti, Lexikon der Bräuche und Feste  Herder, 2001 Freiburg in Brisgau.
6. numéro de noël 2002
7. déjà cité, La paille et le feu. page 65
8. page 179 Une enfance en Alsace, 1907-1918,  par   Elisa Rossignol chez Sand 1990, puis chez France Loisirs.
9. Becker-Huberti page 311 déjà cité
10.   Fêtes et traditions de France, Alain-François Lesacher, mémoires, Éditions Ouest-France 96-99
11.   Gianni Bodini, ein gang durchs Jahr riten und brauchtum im Alten Tirol, Tappeiner, Italie 1992

En résumé : Joyeuses Pâques à tous !!

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